top of page

Voici, le témoignage de ma belle-soeur, il aura fallu presque 10 ans pour en parler avec eux... Merci pour ce récit et ses conséquences, qui permettra de sauver des vies...

-1-
Une belle semaine de juin s’annonçait pour mes enfants, mon mari et moi…La semaine ou se déroule la kermesse des écoles, les fêtes des associations sportives et celle qui se rapproche aussi des grandes vacances. Rien ne laissait présager qu’elle serait la pire de nos vies…
Ma belle sœur, son mari et leurs deux filles étaient venus nous rendre visite à la maison car nous venions de terminer la piscine ; Ni la dalle de propreté ni la cloture n’étaient encore faites ; Le soir même, un couple d’amis et leurs deux enfants étaient invités à prendre l’apéritif…
Après s’être tous baignés dans la piscine, nous sommes allés sur la terrasse. J’avais pris soin de retirer tous les jouets de l’eau afin que rien ne puisse attirer l’attention des enfants. J’avais fait la « leçon » aux miens en leur disant qu’il était interdit d’aller se baigner sans les parents. Ils avaient 5 ans ½ et 8 ans ½ …et donc en âge de comprendre les choses.
J’avais cependant mis une chaise longue en travers des escaliers de la terrasse afin de bloquer le passage au cas où …mais un des hommes l’enleva aussitôt en disant que sa fille ainée de 19 mois qui marchait, ne savait pas encore descendre les escaliers… L’apéritif se passe, les enfants étaient rassemblés dans un coin de la terrasse et jouaient ensemble. Alors que nous avions une conversation a propos des enfants, ma belle sœur se demande ou est sa fille en ne la voyant plus avec les autres. Aussitôt c’est la panique, tout le monde se lève et se tourne vers la piscine…Nous voyons alors la petite, à la surface de l’eau, inerte. Mon mari saute le muret qui sépare la terrasse de la piscine pour sortir Kalista de l’eau…quelques minutes avant, elle était là avec les autres et personne ne l’avait vu ou entendu descendre. Les deux autres hommes le suivent à leur tour. Mon mari lui fait alors du bouche à bouche et un massage cardiaque… A un moment, il nous dit même que son cœur bat. De mon coté je rentre et appelle les pompiers. En attendant l’agitation à la maison, les voisins avaient aussi prévenus leurs médecins…Le temps de ressortir, le jardin était envahi de monde (voisins, docteurs..). Les pompiers sont arrivés peu après , le samu et les gendarmes aussi. Tout était confus pour moi qui devais gérer tout ce monde, ma belle sœur qui était effondrée, les enfants…heureusement une voisine s’est proposé de prendre les enfants chez elle pour éviter qu’ils n’assistent à ce triste évènement. Plusieurs heures s’écoulèrent pendant lesquelles les secours faisaient tout leur possible pour essayer de réanimer ma nièce mais en vain…Les pompiers disent à ma belle sœur que si la petite était réanimée, elle aurait surement des séquelles irréversibles comme un peu pour la préparer au pire. Je vais alors récupérer mes enfants chez la voisine et ma fille demande alors des nouvelles de sa cousine. Je lui réponds qu’elle est morte. Notre amie repart chez elle avec ses enfants et les miens ou ils passeront la nuit. Son mari reste avec nous pour nous soutenir dans cette épreuve. Je me revoie encore sur la terrasse, à la nuit tombée, renseigner les secours qui remplissaient l’acte de décès. Entre temps, mes beaux-parents sont prévenus par téléphone…

-2-
Je me souviens des premiers mots de mon beau père en s’adressant à mon mari « c’est ta faute » comme si il fallait absolument désigner un coupable. Rongé par la culpabilité et l’incapacité de n’avoir pu sauver sa nièce, mon mari fait un malaise. Le docteur et les pompiers s’occupent alors de lui…Je suis effondrée, perdue. Mon ami me réconforte. Puis en attendant que mes beaux parents arrivent (plus de 2 heures de route) une équipe de psychologues des pompiers rend visite à mes enfants (chez nos amis) ou je les rejoints ; de retour à la maison ils s’occupent aussi de moi. Ils me demandent si nous avons des armes à la maison ou si l’on peut accéder aux combes craignant un geste désespéré de mon époux. Ils me questionnent aussi afin d’occuper mon esprit et sortir mes émotions. Mon mari est toujours dans un état critique allongé sur le canapé. Il est quasiment 2 heures du matin lorsque mes beaux parents arrivent à la maison, c’est un couple d’amis qui les a amenés. Je sors sur le chemin pour les accueillir, sans savoir que dire. 
Peu à peu, les équipes de secours se retirent…nous nous retrouvons seuls. Je dois à nouveau gérer l’organisation des couchages, chose bien futile comparée a ce tragique évènement mais oh combien nécessaire ; Notre petite nièce occupe le lit de la chambre d’amis ou nous avons installé des bougies afin de la veiller.
Une fois tout le monde casé, j’installe mon mari toujours mal en point sur un matelas pneumatique à moitié gonflé. La nuit se passe. 
Le lendemain, à la première heure, je me lève…je téléphone à mes parents et je me rends à l’école ou mon amie m’y attend avec mes enfants. J’explique ce qu’il s’est passé la veille aux maitresses. Les commérages vont bon train dans la cour de l’école, il aurait mieux valu être sourd dans ces moments là lorsqu’on entend les âneries de certains ! Mes enfants passeront leur matinée à l’école afin de les éloigner de la maison ; C’est en effet, ce matin même que les pompes funèbres doivent enlever le corps. Mon mari, notre beau frère et notre ami partent en ville acheter une jolie robe blanche pour ce petit ange…
Les pompes funèbres arrivent…Le garde champêtre est là également (je ne sais pas pourquoi). Ma nièce est rapatriée dans sa ville de résidence. Tout le monde repart peu à peu.
Nous partirons nous aussi le lendemain pour assister aux funérailles.
De retour à la maison, l’inévitable ballet des vautours commencera : les sectes en tout genre au portail, les agents immobiliers pour savoir si l’on vend la maison et les coups de téléphone anonymes imitant le « bruit » d’un enfant qui se noie.
Reste encore à gérer les formalités d’usages : remercier les médecins qui sont intervenus bénévolement et les secours, aller aux pompes funèbres…

-3-
J’ai écrit ce témoignage à la demande de ma belle sœur, c’est en quelques sortes, un exutoire ; Se dire qu’à cause d’une fraction de seconde ou l’on n’aura pas été assez vigilant, voire distrait, plusieurs vies seront à jamais bouleversées.
A la suite de cet accident, mon mari a eu des pertes de mémoires dues au choc, mon fils devenu agressif à l’école a du être suivi par une psychologue tout comme ma fille, 2 ans plus tard, qui avait des crises d’angoisse et partait à l’école en pleurant ou cauchemardait. Le sujet est resté longtemps tabou avec mon mari…je pleurais, cachée de mes enfants ou de mon époux pour ne pas aggraver leur chagrin. La seule chose qui comptait pour moi, était leur bien-être avant tout ; si eux allaient bien, alors moi j’irai bien.
Malgré tout, je ne pouvais m’empêcher de penser à tous ces moments qu’une mère partage avec sa fille et me dire que ma belle sœur en serait privée.
Le temps a fait son Å“uvre…La peine s’est apaisée. Il ne passe pourtant pas un jour sans que je pense à cette petite fille que nous connaissions à peine. 
En écrivant ce témoignage, je me rends compte qu’à aucun moment durant la tragédie, je n’ai eu de place pour les larmes. Lorsqu’un accident comme celui là arrive, c’est en général dans la piscine des parents mais le fait que ce soit passé dans notre maison, me maintenait toujours dans le rôle de maitresse de maison et donc a continuer à gérer les évènements (l’accident, les secours, la famille, les amis, les enfants, les couchages …). Je n’ai pu enfin me laissait aller véritablement plusieurs mois après. J’étais cependant rassurée de constater que les parents des camarades de mes enfants continuaient à me faire confiance lorsque les enfants étaient invités à la maison ; c’était très rassurant pour moi de ne pas perdre notre crédibilité.
La piscine a été cloturée depuis mais RIEN ne remplace la vigilance constante des adultes …une cloture peut être franchie, une alarme défaillante.
Dix ans après, le vide est toujours là mais la seule façon de le combler c’est de continuer à vivre entourés de l’amour de ses proches.

bottom of page